Un adulte sur onze dans le monde (425 millions) est atteint de diabète selon des chiffres publiés en 2017 par la Fédération Internationale du Diabète (FID). L’équipe du Professeur Decio Eizirik (ULB Center for Diabetes Research) s’intéresse à cette problématique depuis de nombreuses années. Avec des collègues de la VUB, il est en bonne voie de voir son projet de recherche portant sur l’imagerie des cellules bêta évoluer et devenir la spin-off « BetaBild ». Un projet dont les origines remontent à 2006, lors du premier appel à projet du pôle de compétitivité BioWin.
L’histoire remonte à 2006, lors du lancement de Keymarker, premier projet soutenu par BioWin en recherche multidisciplinaire. Ce projet avait pour ambition d’utiliser la génomique fonctionnelle afin de découvrir des biomarqueurs de cellules, dont des cellules β, pour l’imagerie dans les domaines du diabète de Type 1, de maladies auto-immunes et de cancers. Après l’évaluation à mi-parcours, il a été décidé de se focaliser sur la quantification par imagerie des cellules β du pancréas.
12 ans plus tard, où en est l’étude des cellules bêta ?
Pr. Decio Eizirik : Nous savons que la dysfonction et/ou la mort des cellules β jouent un rôle déterminant dans la pathogenèse des différentes formes de diabète mais l’évolution de la quantité de ces cellules au cours du temps n’est pas encore connue avec précision. La mesure de la fonctionnalité de ces cellules bêta est réalisée de manière indirecte en dosant la quantité de peptide C circulant. Il n’y a actuellement aucun moyen fiable de quantifier la masse des cellules bêta in vivo. De plus, le manque de techniques d’imagerie des cellules β entrave l’évaluation de l’impact des nouveaux médicaments visant à prévenir la perte de ces cellules dans le diabète. Il y a donc un besoin urgent de techniques permettant la quantification de cellules β, et ce, de manière non invasive et directe.
Pourquoi est-ce si difficile ?
Pr. Decio Eizirik : Un des obstacles est le faible pourcentage que représentent les cellules : de 1 à 3 % de la masse totale du pancréas. Nous notons aussi la dispersion non homogène de ces cellules sous forme d’îlots, eux-mêmes composés de cellules endocrines de plusieurs types. Enfin, la limitation des techniques actuelles d’imagerie médicale ne permet pas d’avoir des images des îlots de manière individuelle.
Or, la quantification de la masse totale des cellules β permettrait d’améliorer la prévention du diabète et le développement de traitements personnalisés.
Quelle est votre approche ?
Pr. Decio Eizirik : Aujourd’hui, il existe 4 (radio-)traceurs testés dans des études cliniques chez l’être humain. Malheureusement, ils présentent un défaut de spécificité ; ils ne sont pas encore assez sensibles pour quantifier la population cellulaire bêta. Nous devons donc identifier de nouveaux biomarqueurs et améliorer la structure des radiotraceurs existants.
Au centre de recherche sur le diabète (ULB), une approche innovante basée sur l’identification d’isoformes spécifiquement exprimées dans les cellules β est utilisée afin d’identifier de nouveaux biomarqueurs. Cette approche utilise des données transcriptomiques générées par RNA sequencing et confronte les résultats avec ceux obtenus dans d’autres tissus abdominaux pouvant potentiellement interférer avec l’imagerie des cellules β tels que l’estomac, le foie ou les intestins. Jusqu’à présent, nous avons identifié trois nouveaux biomarqueurs spécifiques des cellules β et/ou β et α : l’isoforme a de la protéine FXYD2γ (FXYD2γa) et DPP6 (DiPeptidyl Peptidase 6) et un troisième en voie de développement.